03 décembre 2009

Europe du chômage : L'Espagne vers une réduction du temps de travail

Et si les socialistes espagnols donnaient raison à Jeremy Rifkin, l'auteur de "la fin du travail" et devenaient les fossoyeurs du lancinant et puéril : "travailler plus" ?

Et si ceux-ci étaient les précurseurs d'une nouvelle donne économique et sociale face à la crise économique génératrice de chômage endémique ?

"L'Espagne vers une réduction de la durée de la journée de travail " : Voilà un titre qui va faire sourire plus d'un thuriféraire du "travailler plus pour gagner plus" !

Cependant, on peut lire dans Courrier international que : "Depuis deux ans que la crise économique dure, le gouvernement n'a cessé de répéter qu'il ne s'agissait pas d'une crise de l'emploi et qu'aucune réforme du marché du travail ne s'imposait. Mais, avec un taux de chômage à 18,5 %, inédit dans un pays développé, l'exécutif a dû changer son fusil d'épaule", constate le quotidien madrilène El Pais. Le 2 décembre, le Premier ministre Zapatero (socialiste) a proposé une série de mesures, parmi lesquelles une réduction de la durée de la journée de travail pour éviter des licenciements.

Ainsi, il semblerait que l'idée de la réduction du temps de travail qui était selon le Baron Sellières : "Aberrrrrante" ne soient à terme, l'une des seules solutions pour atténuer le chômage et limiter sa progression.

Si l'expérience des 35H00 lancée par Martine Aubry fut très largement sabotée par les organisations patronales, il faut dire que ces derniers mois, faire faire 35H00 par semaine aux salariés est le maximum compte tenu de la faible activité économique.

Seulement, il viendra bien un moment où la machine économique redémarrera et où on s'apercevra qu'il n'est pas concevable de faire travailler certains plus de 50 heures quand les autres attendront vainement un emploi.

Les libéraux ont déjà pourtant leur petite idée qui s'appelle "flexisécurité".

Vous avez certainement, ces derniers temps entendu utiliser le terme provoquant de "privilégiés" en ce qui concerne les salariés titulaires d'un CDI ! Et bien, selon les experts libéraux, l'idée pour réduire le nombre de salariés au chômage, consiste à : partager le chômage.

En effet, compte tenu que l'emploi se raréfie, les entreprises pourraient sans trop de contraintes se séparer de leurs salariés (plus de recours au prud'hommes ni indemnités de licenciement). Ceux-ci qui seraient pris en charge par l'état. L'Etat (argent des contribuables) mettrait en place une structure de recyclage permanent, permettant aux salariés licenciés, de se former aux nouvelles demandes des entreprises.

Dans l'idéal, le salarié, à nouveau opérationnel, retrouve un nouvel emploi, jusqu'au prochain licenciement, où il recommencera ... à se former ...

Théorie que tout cela ! Car, on sait parfaitement qu'il faudrait que l'ensemble des salariés soit à même de suivre de nouveaux cycles de formation et que les entreprises aient des besoins permanents et croissants de personnel.

Or, il ne faut pas être un brillant économiste pour savoir que les progrès technologiques et que la main d'oeuvre des pays d'Asie, ne vont créer, à terme, dans les pays d'Europe, que des emplois de scientifiques ou de techniciens très spécialisés.

Cette particularité va laisser sur le carreau la quasi totalité de la population en capacité de travailler. Le secteur si "prometteur" des services à la personne ayant prouvé sa capacité à ne générer que des emplois précaires et mal payés, nous sommes à un tournant !

Mais alors, que peut-on faire et n'est-il pas trop tard pour réfléchir au problème ?

Les partis et formations politiques qui nous gouvernent et aspirent à le faire, feraient bien de se procurer un ouvrage incontournable ou plutôt indispensable publié en 2001 : "La fin du travail" écrit par Jeremy Rifkin

Qui est Jeremy Rifkin ?

Jeremy Rifkin est le président-fondateur de la Foundation on Economic Trends (Washington, DC). Il enseigne au sein du programme de formation de managers de la Wharton School (université de Pennsylvanie). Jeremy Rifkin a été, notamment le conseiller personnel de Romano Prodi pendant sa présidence de la Commission européenne. Il est aussi conseiller spécial du groupe du Parlement européen sur l'avancement de la troisième révolution industrielle et le développement de l'économie de l'hydrogène. Il est entre autre l'auteur de "la fin du travail" - Source Fondapol

Qu'écrivait-il dans "la fin du travail" ?

"Il existe une relation inversement proportionnelle entre l’évolution de la productivité d’une économie et celle de ses emplois. Les emplois sont condamnés à disparaître en grande partie : nous entrons dans l’âge de l’informatisation, qui ne pourra jamais absorber les millions de travailleurs qu’employaient l’agriculture, puis l’industrie, puis le tertiaire.

La perte d'un emploi devient de plus en plus insupportable et simultanément l'évolution des modes d'organisation du travail s'avère extrêmement stressant pour l'homme. Il faut revoir le contrat social, trouver une autre manière de redistribuer les richesses et partager au mieux les gains de l’énorme productivité actuelle et à venir.


Pour faire face à la disparition inéluctable du travail humain : partager le travail et réorganiser les rapports sociaux vers l'économie sociale, vers le tiers secteur
Les trois secteurs traditionnels de l’économie subissent des mutations technologiques qui envoient des millions de personnes au chômage.

Le secteur du savoir est le seul à émerger; composé d’une élite d’innovateurs industriels, de scientifiques, de techniciens, d’informaticiens, d’enseignants et de consultants, il n’absorbera pas les centaines de millions d’individus balayés par le déclin mondial du travail, préparé par les immenses changements technologiques s’installant dans l’agriculture, l’industrie et les services.
" .../... La logique du marché pousse l’entreprise à sa restructuration interne, qui signifie une baisse du personnel.

Le reengineering consiste en une organisation plus souple de l’entreprise, notamment grâce à un aplanissement des hiérarchies. Ces décisions accélèrent la production mais suppriment un nombre considérable d’emplois, en particulier ceux des cadres moyens, qui seront 80% à avoir perdu leur emploi à la fin de ce phénomène.
... / ...

Pendant plus d’un siècle, des auteurs et des scientifiques rêvèrent d’un monde futur où les machines remplaceraient le travail humain. Ils dépeignirent ce monde comme un paradis dans lequel les machines travaillent et l’homme est libre de s’adonner à une vie de loisirs. De grandes expositions internationales stimulèrent le désir de progrès technologique, notamment pendant la crise des années 30.
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L’industrie a souffert la première de l’automatisation. Le secteur de l’automobile, le Japon montrant la voie aux États-Unis, reconfigure à grande vitesse ses activités et investit dans les nouvelles technologies de l’information destructrices d’emploi. Le secteur de la sidérurgie s’automatise également fortement, réduisant considérablement ses besoins en main-d’œuvre. Puis les secteurs du caoutchouc, de la houille, de la chimie, de l’électronique, de l’électroménager, du textile ont été touchés par la recherche de méthodes modernes qui provoquent la perte de millions d’emplois d’ouvriers.
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Le secteur des services n’est pas épargné, en témoignent les réductions de personnel continuellement annoncées par les banques, les assurances, les communications. Les méthodes informatisées de traitement des dossiers rendent inutiles nombre d’employés. L’apparition du télétravail métamorphose le travail au bureau. Les nouvelles méthodes de stockages nécessitent moins de transports et d’entrepôts, d’où une baisse des effectifs de ces deux secteurs.
Le tertiaire ne pourra pas absorber la perte d’emploi due aux bouleversements dans l’industrie; les PME ne sont plus une solution; le secteur public décline; la restauration ne pourra pas équilibrer les mouvements du secteur des services.

Le recyclage, solution proposée comme excuse aux réductions de personnel, ne fonctionne en réalité que pour un cinquième des chômeurs.
... / ... L’humain n’est pas en mesure de suivre le rythme imposé par la machine et la cybernétique, et souffre de la prise en charge de son propre emploi par la machine. La perte de son emploi est donc pour lui, au-delà des difficultés matérielles, une perte d’identité dangereuse. ... / ...

Les nouvelles méthodes de production, plus stressantes, mettant en œuvre des pratiques d’émulation pesantes, provoquent de nombreuses maladies professionnelles. Le monde entier souffre d’une aggravation alarmante du chômage.
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Repenser la semaine de travail
Le mouvement pour la réduction du temps de travail est historique. Il est arrivé qu’une loi des trente heures soit débattue et votée (La loi Black). L’évolution est progressive, et de 80 à 60 heures, puis de 60 à 40 heures, nous devons maintenant nous diriger vers les 30 voire les 20 heures.

Il existe plusieurs moyens d’aboutir à une réduction du temps de travail, mais celle-ci ne fonctionnera que si le changement se fait conjointement entre tous les pays. Cette condition peut cependant être remplacée par l’instauration de tarifs douaniers ciblés contre ceux qui ne pratiquent pas cette politique. ... / ...

Cette stratégie doit s’accompagner de mesures conjoncturelles contre le chômage. Les secteurs publics et marchands ne sont plus en mesure d’assurer certains des besoins fondamentaux des populations ; il est nécessaire d’établir un nouveau contrat social qui s’appuie sur le développement du secteur non-marchand, ou tiers secteur, porteur de nouvelles valeurs d’entraide et de solidarité.
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Une économie non marchande, qui intégrerait un capital social en plus des capitaux de l’Etat, serait une solution. Ce tiers secteur, domaine qui comblera le vide provoqué par la suppression d’emplois, est celui de la vie associative, qui tisse le lien communautaire ... / ... Ce tiers secteur, rassemblant des bénévoles efficaces, peut jouer dans la société le rôle de médiateur entre secteur public et secteur privé ... / ... "
Source des extraits CNAM

Si à droite, on poussera des hauts cris à, la lecture de ces extraits, nous pensons que la gauche peut et doit réfléchir et s'inspirer de ces propositions.

Il est ridicule de continuer d'avoir peur d'évoquer le sujet du temps de travail comme s'il s'agissait d'une malédiction qui aurait fait perdre les élections. Tous les français ont aujourd'hui dans leur entourage un parent ou amis qui cherche à intégrer le monde du travail ou se trouve au chômage. Ces français se moquent complètement des litotes de notre Président sur "la valeur travail" et son amour immodéré des usines qui lorsqu'elles ne ferment pas ... n'embauchent plus !

Les français ont soif de solidarité face à une crise et une mondialisation dont-ils ne sont pas responsables. Il semblerait que le Parti Socialiste n'ait pas de programme économique en vue des élections de 2012 ?

Travailler moins pour faire travailler plus de gens nous semble un piste juste !

Crédit et copyright dessin
Nagy




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